Le premier entretien c’est comme le premier rendez-vous : on ne connaît rien de son interlocuteur et pourtant il va falloir le séduire ! Courtoisie, attitude, langage corporel, dress code… Il semblerait que tout se joue dans les premières minutes. Et comme « un candidat averti en vaut deux », nous avons demandé à Lucie et Clément, deux recruteurs de NOVENCIA comment bien préparer cette échéance et éviter les faux pas. Entretien croisé.
Le cabinet de recrutement international Robert Half a publié une enquête sur la manière dont les DG et les DAF français évaluent leurs candidats. Dans cette enquête un dirigeant sur trois estime que « tout ou presque se joue lors du premier entretien ». Quel est votre sentiment, votre retour d’expérience sur cette notion de « première impression qui est la bonne ? »
Lucie : Le « tout ou presque » est important. C’est toute la difficulté de cette notion de « première impression : se défaire de ses premiers ressentis vis-à-vis d’un candidat. Car, l’entretien, même si on a essayé de le gamifier ou de le rendre plus naturel, reste un jeu d’apparences voire de séduction. C’est pourquoi, j’aime remettre en cause cette idée de première impression. C’est un peu comme un challenge personnel qui me permet de vaincre ou travailler sur mes propres a priori. Selon moi, il y a du positif en chacun, il faut creuser et voir si nous pouvons répondre aux attentes du candidat et s’assurer qu’il se sentira à l’aise chez nous. Un recrutement réussi pour nous, c’est également une intégration réussie. En effet, l’organisation doit correspondre aux attentes et valeurs du candidat !
Clément : Généralement, on a rapidement une opinion sur son interlocuteur. C’est inhérent à toute relation humaine et l’entretien de recrutement ne déroge pas à la règle. Tout se joue dans les premières minutes. Un candidat enthousiaste, énergique, qui se prête au jeu avec un plaisir affiché laissera évidemment une « première bonne impression ». A contrario, une personne fermée, qui vous tend une poignée de main molle, et qui n’affiche pas les codes de politesse basiques, aura moins de chance de recueillir un avis favorable.
Si cet adage confirme la règle, quels conseils donneriez-vous pour bien préparer ce premier entretien ?
Lucie : Pour bien préparer un entretien, il faut bien se connaître et remettre en question son parcours. Pourquoi j’ai pris telle direction plutôt que celle là par exemple, qu’est ce qui me plait dans ce que je fais ? Mais au-delà de ces considérations, il faut surtout être positif, admettre les échecs, comprendre et apprendre de ses erreurs.
Clément : Premièrement, soyez à l’heure ! Ou alors prévenez de votre retard même par SMS. Ce qui évitera d’envoyer un signal négatif à votre recruteur. Dans la mesure du possible, arriver en avance, c’est s’accorder la possibilité de se rafraîchir, de se mettre dans des conditions physiques agréables et surtout d’éviter la main moite au premier contact !
Concernant le dress code, au risque de paraître « has been », j’adhère au respect des codes professionnels. Il n’y a pas si longtemps, un candidat s’est présenté devant moi avec un t-shirt délavé, troué, je ne peux pas dire qu’il a fait bonne impression !
Autre conseil, restez souriant, vous ne risquez rien ! Si vous êtes là, c’est que votre profil a retenu notre attention et que nous sommes contents d’échanger sur votre parcours. Soyez donc sûr de vous !
Pour faire la meilleure impression, il est admis que le langage corporel, notamment les gestes, soient décisifs. Quelles postures, quelle(s) attitude(s) conseillerez-vous pour faire passer les bons messages ?
Lucie : Bien entendu, il me semble opportun d’éviter le style « avachis » même si on instaure une ambiance un peu relax. Partant du principe que, moi-même, je ne vais pas mettre les pieds sur la table donc j’attends de même de mon interlocuteur. Plus sérieusement, une poignée de mains dynamique, lors des présentations, fera toujours meilleure impression qu’une main fuyante. Et être souriant ça fonctionne toujours et c’est communicatif !
À l’inverse, un recruteur doit également s’adapter à son candidat. C’est primordial pour amorcer un dialogue de qualité et ainsi être vite en phase.
Clément : Se retrouver face à quelqu’un que l’on ne connaît pas peut être extrêmement éprouvant ! C’est pourquoi, il faut adopter une attitude positive. Dos droit, pieds posés au sol, maintien du contact visuel vous donnera de l’assurance et vous permettra de poser votre voix et donc votre discours. Éviter les bras croisés, synonymes d’ennui ou de fermeture d’esprit.
Quant à ce qu’il ne faut pas faire, je mettrais en tête de liste, la lecture du CV. J’ai pu observer beaucoup de candidats qui n’arrivaient pas à se détacher de leur feuille. Après tout, il s’agit de vous. Racontez-vous simplement, amenez une réalisation à chaque expérience et si vous en oubliez, on ne vous en voudra pas !
Quelles sont les questions classiques à préparer et qui semblent inévitables ?
Lucie : Qualités défauts ? Non bien entendu c’est une blague ? ! Le projet professionnel est incontournable. Il faut bien se remettre en question sur les changements et les choix effectués dans une carrière.
Et pour les plus juniors, il est important qu’ils cernent ce qui les motive dans leur métier, pourquoi ils choisissent cette carrière, ce pourquoi ils font ce métier, ce qu’ils ont envie d’apprendre. Mais aussi les disciplines / technos avec lesquelles ils sont le plus à l’aise.
Clément : Il y a autant de questions que de recruteurs ! Pour ma part, je ne pose plus depuis très longtemps la question des qualités et des défauts. En revanche, je challenge mon candidat sur sa capacité à rebondir avec une question telle que « quelle a été votre plus grande problématique lors de votre dernière expérience et comment l’avez-vous surmontée ? ». A ne pas oublier, non plus, ces deux questions, « Pourquoi êtes-vous à l’écoute du marché ? » ou « Pourquoi êtes-vous devant moi aujourd’hui ? ».
Doit-on également anticiper les questions insolites à l’instar de la fatidique question « quel est votre plus grand échec » ?
Lucie : Et mince je n’avais pas anticipé celle-là ?. Oui, on peut toujours poser une question insolite. Toutefois, il faut faire attention quand même. Si on force les candidats à ne focaliser que sur l’insolite, on risque de générer du stress inutile et du coup « tuer » la spontanéité. Personnellement si je pose ce genre de questions, je m’attends tout de même à ce que la personne y réfléchisse un peu et ne me réponde pas du tac au tac. Je pense que ça dépend des personnalités aussi. Il y a des personnes excellentes en improvisation et d’autres qui ont besoin de bien se préparer pour se rassurer. Mais à l’heure de la gamification, je ne suis pas sûre que ce soit vraiment nécessaire de générer du stress supplémentaire et de perdre du temps sur la préparation de questions qui sortent du cadre.
Clément : Il faut toujours se tenir prêt pour des questions insolites. L’essentiel est de ne pas répondre trop vite, prenez le temps de réfléchir voire parfois reformuler la question. Et si on vous pose la question sur l’échec, vous devez prouver à votre interlocuteur que vous avez su en tirer des leçons et expliquer comment vous avez transformé cet échec en une réussite.
À compétences égales, qu’est ce qui fait qu’on rappelle un candidat pour un deuxième entretien ?
Lucie : Je pense que le feeling et la motivation jouent le plus, même à compétences inégales d’ailleurs. On appréciera plus facilement une personne motivée qui s’est renseignée sur nos métiers et notre activité par exemple.
Clément : La dimension humaine, ce qu’on nomme par le feeling sera déterminante. Car au-delà du candidat, on se pose les questions de savoir « comment va-t-il s’intégrer dans sa future équipe ? ». Ensuite, on rappelle un candidat pour « valider » la première impression. Chez nous, dans le conseil, il y a de toute façon un second entretien pour valider avec nos experts techniques la pertinence d’un candidat.
D’ailleurs, à quoi sert un 2ème entretien quand un recruteur a déjà pris une décision positive lors du premier ?
Lucie : Il sert à valider les compétences techniques. En premier lieu, nous validons la motivation et la cohérence par rapport à notre contexte, c’est-à-dire : va-t-on pouvoir répondre à ses attentes ? Mais sans un minimum de compétences techniques, ça va être compliqué pour les métiers que l’on recrute et les contextes projets de nos clients. Il faut donc cette validation technique.
Clément : Pour un consultant technique, parfois un entretien peut suffire, mais pour des chefs de projets, des Datascientist dont le cœur de métier est de collaborer avec toutes les parties d’un projet, il est important que le candidat rencontre les différents acteurs de la future organisation.